- VILLA (histoire)
- VILLA (histoire)VILLA, histoireMot latin signifiant à la fois maison de campagne et propriété rurale; on l’entendra ici dans son second sens, c’est-à-dire dans celui de domaine.Le domaine romain classique se signale par son étendue en général considérable (plusieurs milliers d’hectares), sa mise en valeur soumise au faire-valoir direct, son exploitation par des équipes d’esclaves. Les difficultés de recrutement de ces derniers à partir du IIIe siècle amenèrent les grands propriétaires à prélever sur leurs domaines des lots de terre qu’ils affermèrent à des cultivateurs libres, les colons, que la législation impériale attacha à leur tenure. Parallèlement, et cela pour accroître le rendement du travail servile, des tenures furent concédées par les propriétaires à une partie de leurs esclaves. Le domaine romain prit ainsi à la fin de l’Antiquité une structure bipartite, l’une continuant à être soumise au faire-valoir direct par des esclaves, l’autre formée de tenures dont les exploitants furent contraints à collaborer à la mise en valeur de la première par des prestations de travail gratuit ou corvées.La villa carolingienne se présente soit comme fragment d’une grande fortune foncière, soit comme possession unique d’un propriétaire. Correspondant souvent à un village, voire à un groupe de villages, sans nécessairement en recouvrir tout le terroir, sa superficie peut varier de moins de cent à quelques milliers d’hectares. Son élément principal, le domaine (ou réserve), est la partie directement exploitée par le maître ou seigneur (ecclésiastique ou laïc). Géré depuis la curtis (maison du régisseur entourée de bâtiments d’exploitation), il comprend des étendues importantes de terres arables, des prés, des vignes, des bois et des friches. Au domaine sont rattachées de petites exploitations, les manses, tenues par des esclaves (dont la condition évolue lentement vers le servage) et des colons qui, bien que juridiquement libres, sont étroitement dépendants de leur maître et dont les manses ont été soit incorporés au domaine, soit créés de toutes pièces par les propriétaires. Esclaves «chasés» et colons doivent à leur seigneur des redevances en nature et en argent, mais sont astreints surtout à de très lourdes corvées sur la réserve, qu’ils mettent ainsi en valeur avec les valets ruraux, esclaves dépourvus de tenure.Si telle est dans ses grandes lignes la structure classique de la villa, comme on peut l’observer par exemple dans la région parisienne, il s’en faut de beaucoup que cette esquisse corresponde entièrement et toujours aux réalités qu’on découvre dans les sources. Contenance fort variable des manses, entassement de tenanciers sur certains d’entre eux, alors que d’autres semblent être des exploitations familiales, désagrégation de la villa par suite des partages successoraux et des concessions de certains de ses éléments en bénéfice vassalique, structure très variable selon la manière dont la villa s’est constituée et plus encore selon les régions: autant de traits de diversification du régime domanial qui, en France du Centre et du Sud, en Allemagne centrale et méridionale, en Italie du Nord, donnent une image bien différente de celle qui a été esquissée. On ne saurait d’autre part considérer la villa carolingienne comme un organisme vivant en autarcie. Si elle assure d’abord la subsistance du maître et de son personnel, si ses ateliers fabriquent des vêtements et des outils nécessaires aux tenanciers, le surplus de sa production, en grains et vins notamment, est écoulé au-dehors, sur les marchés voisins et souvent fort loin: la villa concourt ainsi à animer le commerce intérieur de l’Empire carolingien.
Encyclopédie Universelle. 2012.